Le rêve
La grandeur de l’humain est de croire sans voir,
De sentir, sans le thym, les odeurs en mémoire.
De frôler la dentelle au toucher du regard,
De goûter la prunelle des yeux dans le noir.
J’ai cet air de chanson qui me vient sans le son :
La guêpière aux jupons et son accordéon.
Je pense à Beethoven, sourd, doué de génie,
Surdoué de la neuvième symphonie.
L’histoire de Thomas, apôtre éberlué
Devant ce pauvre gars mort et re-suscité.
Il désire toucher pour être rassuré
Comme il est enseigné en université.
La vie est le cadeau se moquant du chapeau
Au-dessus du gâteau qui reçoit la cerise ;
Qu’il est tendre l’agneau à l’écart du troupeau,
Ombré par l’arbrisseau à la fraîcheur exquise.
Je rêve d’une église en perte de vitraux,
Où souffle la brise sous son nu chapiteau ;
La moniale, éperdue, à genoux, sur la dalle
Adore, dans les nues, l’icône virginale.
Je rêve d’un chemin où la feuille du chêne
Adoucira mes pas au début de l’automne ;
Quand la pomme du pin qu’on recueille sans gène
Ecorchera mon bras, tendu pour une aumône.
L’étoile file au ciel bien plus rapidement
Que jaillit l’étincelle avivée par le vent ;
Je la voudrais aux yeux du mendiant ingénu
Qui sourirait, heureux, sanglotant et ému.
Je rêve d’une lune aussi bleue que la terre,
Aux côtés d’un soleil tombé en pleine mer
Qui rafraîchit les dunes en feu au désert
Transpercées, dès l’éveil, par l’épée meurtrière.
Je songe à une ville aérée et tranquille
Où les adolescents ne sont plus mis au ban ;
Relégués et fragiles dans leur bidonville,
Ils deviennent souvent de petits délinquants.
Depuis qu’Adam a fait d’une Eve la conquête,
Le rêve si joli est tapi dans la tête
Et ne veut en sortir afin de ne pas nuire
Au plaisir de chérir ses délicats délires.
Rêver est un cadeau bien plus grand sans ruban ;
La boîte de gâteaux ne vaut pas un printemps ;
Le collier de diamants est la félicité
De l’éblouissement du rêve inachevé.
Bisous Diane